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Le Combat de Lagarde
11 mai 2014

Lagarde et la presse allemande

   La Gazette de Lorraine, journal quotidien en langue française, dont le siège est à Metz, a été créé pour ne pas laisser les lorrains dans l’ignorance des événements qui vont se dérouler. L’office supérieur de la censure établi à Berlin édicte les règles générales, et tous les articles sont contrôlés par un bureau à Berlin. L’importance de la victoire allemande à Lagarde est immédiatement amplifiée dans tous les journaux en Lorraine annexée et en Allemagne. Les différents articles parus affichent des résultats bien au-delà de la réalité.

   Gazette N° 8 du mercredi 12 août 1914.

   Victoire allemande sur la frontière lorraine.

Berlin, 11 août (B.W.) – Une brigade mixte détachée du 15e corps français a été attaquée par nos troupes de protection. Près de Lagarde, en Lorraine, l’ennemi a été repoussé avec de grandes pertes dans la forêt de Parroy, au nord-est de Lunéville. Il a laissé entre nos mains un drapeau, deux batteries, quatre mitrailleuses et 700 prisonniers. Un général français est tombé.

   Gazette N° 9 du 13 août.

   Près de Lagarde, les troupes allemandes ont fait plus de mille prisonniers non blessés, soit plus d’un sixième des deux régiments français qui ont pris part à l’engagement.

   Gazette N° 12 du mardi 18 août.

   Le combat de Lagarde. - aurait été des plus acharnés. Des témoins oculaires racontent qu’une mitrailleuse avait été placée sur la tour de l’église et faisait feu sans interruption. De toutes les maisons on tirait. Depuis huit jours, les Français s’étaient retranchés autour de Lagarde et avaient fait des fossés ; leur position était donc supérieure, mais malgré cela ils ne purent résister à la vigoureuse attaque des nos vaillantes troupes. On raconte que le maire et le curé de Lagarde auraient encouragé au combat contre les Allemands ; le curé aurait dirigé la lutte de l’église.

   GazetteN° 13 du mercredi 19 août.

   Le combat de Lagarde. – Voici encore de nouveaux détails sur le combat de Lagarde. Le combat a duré sept heures. Pendant une chaleur ardente, rapporte le « Pfälz. Merkur », les soldats allemands luttèrent avec succès et un courage bravant la mort contre un ennemi de beaucoup supérieur et retranché jusqu’au bout du nez. Les Français avaient établi des fortifications de campagne très étendues et ouvrirent surtout une vive fusillade à l’apparition de nos troupes sur une hauteur. Nos braves soldats ne se laissèrent pas arrêter et s’avancèrent impétueusement jusque dans les rangs ennemis. Pour arrêter la cavalerie allemande, les Français avaient rempli les prairies de sauts de loup, c'est-à-dire d’excavations qu’ils recouvraient de foin et d’herbe. Mais nos troupes remarquèrent l’attrape, de sorte qu’elle ne produisit pas l’effet désiré. L’attaque de l’artillerie allemande était également brillante. Deux batteries ennemies, dont l’activité était surtout dangereuse, furent bombardées avec un tel succès, qu’en peu de temps la position fut mûre pour l’assaut et put être prise. L’ennemi démonta les canons tant qu’il lui resta de temps. Autour du village même de Lagarde, le combat était très acharné.

   Là, les Français avaient occupé chaque maison. Sur le clocher avait pris position une section de mitrailleuses. Cette position était habilement dissimulée, mais dès qu’on l’avait remarquée, notre artillerie la bombarda, au point qu’après quelques coups on ne voyait que les ruines s’élever en l’air. Le village lui-même a du être bombardé.

   Une attaque par le flanc, dans laquelle la cavalerie intervint également avec succès, apporta la décision pour nous. De nombreux soldats français s’enfuirent tout simplement, d’autres levèrent les mains en l’air, en montrant leurs bagues, et demandèrent pardon. Des objets d’équipement français couvraient le champ de bataille. Un clairon, logé au village, doit deux fois sa vie à son instrument. Celui-ci ayant fait d’abord dévier une balle, lorsque le clairon le portait encore sur le dos, une seconde balle vint frapper l’ouverture, après que le soldat eut placé la trompette sur la poitrine. Cette fois-ci encore, la balle glissa et ne blessa que légèrement le soldat.

   Berlin, 14 août. – Les soldats faits prisonniers par les Allemands à Lagarde ont fait des dépositions importantes, fournissant au gouvernement allemand la preuve complète que depuis des semaines déjà la France était prête par tous les moyens pour surprendre l’Allemagne. La plupart des prisonniers font partie du corps de Marseille et avaient déjà été transférés à Lunéville, il y a six semaines, en pleine paix ! La plupart des garnisons françaises de l’ouest ont été transférées depuis le commencement de mai dans les forteresses de l’est pour renforcer la frontière de ce côté.

   Gazette N° 18 du mardi 25 août.

   Le conquérant du premier drapeau. – Le premier drapeau français qui, dans le combat de Lagarde, est tombé aux mains des Allemands a été dans la gazette du Wéber, pris par un soldat de Westphalie. C’est le fantassin FISCHER de Rimbeck (au sud-est de Paderborn) qui l’arracha des mains de celui qui le portait après un corps à corps acharné. Honneur à lui !

   Gazette N° 23 du lundi 31 août.

   Le curé de Lagarde. – L’Elsässer reçoit de source authentique les communications suivantes. Il y avait mercredi huit jours, un capitaine bavarois se présenta chez un curé du pays de Sarreguemines et annonça que les habitants auront des militaires à loger. Il craignit que ses soldats ne soient maltraités. Ensuite il raconta que nos troupes à Lagarde avaient été « trahies » par le curé. Les gens lui auraient raconté que le curé avait été amené enchaîné à Sarreguemines, parce qu’il avait « tiré du haut du clocher avec des mitrailleuses sur nos troupes », après avoir d’abord « attiré les Allemands dans le village » en disant qu’il n’y avait pas de Français. A Sarreguemines il aurait été fusillé. Plus tard un artilleur raconta que le curé n’avait pas été fusillé, mais que lui (le soldat) l’avait vu étendu devant l’église de Lagarde percé de trente coups de baïonnette. La vérité est, que le curé Demange de Lagarde se porte encore très bien à l’heure qu’il est. Il n’a pas encore quitté Lagarde un seul instant. Lorsque les Français occupaient son église, il protesta. Mais les Français le retinrent à l’église et c’est là que nos troupes le trouvèrent en prière devant le maître-autel. Le curé fut arrêté, mais ne tarda pas à être remis en liberté. Il a mis son église à la disposition des soldats pour servir de lazaret.

 

 

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