Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le Combat de Lagarde

16 janvier 2015

Les lieux du combat de Lagarde

 

Le terrain sur lequel va se passer l’attaque du 11 août commence au nord de Bourdonnay vers Ommeray, s’étendant du fond marécageux de l’étang d’Ommeray à l’est du bois Chanal, près de la route menant de Bourdonnay à Lagarde. Au sud de la localité, le canal de la Marne au Rhin, à l’ouest le plateau contre Ommeray se termine contre Xures et la hauteur du bois du Haut de la Croix.

   La partie nordique du terrain entrant en ligne de compte avant tout pour la brigade de uhlans à cheval commence par le fond des près marécageux de l’étang d’Ommeray qui devait être dépassé au nord de Bourdonnay, préparant le premier arrêt.

   Au sud de l’étang, des pâturages de bétails délimités par des clôtures de fil et par de nombreux fossé marécageux et des haies qui rendent le fait d’aller à cheval impossible et contraignant à des arrêts, des contournements et des déviations.

   Sur la partie nordique, des contreforts de la cote 265 à l’ouest du bois Chanal, la terre est de nouveau sèche. A l’époque de l’attaque, dans les champs, la moisson est prête pour la récolte, elle offre une protection bienvenue à l’infanterie française et allemande.

 

Publicité
Publicité
2 août 2014

UN GRAVE INCIDENT FRONTALIER

   Dans quelques jours va être commémoré le centenaire du combat de Lagarde qui s’est déroulé en Lorraine annexée, le 11 août 1914, juste au-delà de la frontière, un des premiers accrochages significatifs après l’ouverture des hostilités. Il est la conséquence d’un ordre du général commandant la 2e division française de cavalerie prescrivant de faire occuper Lagarde, le 10 au soir, par deux bataillons du 15e corps d’armée appuyés par un groupe d’artillerie. Ce général lance ainsi une opération aux conséquences imprévues : le lendemain, ces éléments organisés dans et autour du village avec un dispositif inadapté, sont dans l’impossibilité de résister à une puissante contre-attaque. Ils sont tués, capturés ou mis en fuite et la localité est réoccupée par les Allemands. Leur réaction violente provoque même un léger mouvement de repli de la part des fractions de la 2e DC placées plus en arrière, amenant le commandant de cette division à craindre de ne pas pouvoir tenir. Son compte rendu alarmiste remonte à l’état-major du 15e corps puis à celui de la 2e armée. Son chef, jugeant l’affaire avec un certain recul, ordonne à ce corps de la traiter avec ses moyens ; par cette décision, il la replace au niveau de son importance réelle : un grave accident frontalier. De plus, il refuse de déclencher une action d’envergure. L’opération initiée par le commandant de la 2e D.C. a une issue tragique accompagnée d’un lourd bilan. Le 15e corps est privé de deux bataillons et deux batteries annihilés par la préparation d’artillerie puis l’assaut adverses : surtout, l’échec lui occasionne une blessure morale, aggravée par le revers subi quelques jours plus tard. En face, les pertes sérieuses sont contrebalancées par l’euphorie d’un succès transformé en victoire éclatante par la propagande.

(Extrait de l’ouvrage de jacques Didier, 10 et 11 août 1914 LAGARDE L’une des premières batailles de la Grande Guerre. Ysec 2006.)

Eglise Lagarde

5 juillet 2014

Dans la revue "TRANCHEES" du mois de juillet, un

Affaire Lagarde

 

Dans la revue "TRANCHEES" du mois de juillet, un article signé Yves Buffetaut sur l'Affaire Lagarde, dont je recommande la lecture.

Jacques Didier

22 juin 2014

Une lutte acharnée

Selon la correspondance d’un militaire participant au combat de Lagarde, il témoigne de l’héroïsme avec lequel tous avaient lutté :

«  A présent nous sommes arrivés sur la route de Nancy et j’écris la lettre allongé auprès du feu de camp. Désormais nous avons reçu le baptême du feu. Sus à l’ennemi ! Tel était le désir ardent de tous et, comme il a été vite exaucé ! En cours de route nous avons appris la chute de Liège ; ce fit une joyeuse nouvelle. " L’Allemagne, l’Allemagne au-dessus de tous ", c’était la réponse que nous avons donnée. Le dimanche nous sommes arrivés devant Lagarde et là nous nous sommes ralliés à nos troupes pour les renforcer. Le lundi tout était encore calme. Personne ne pensait que dans quelques heures déjà, un violent combat allait éclater ici. De petites escarmouches isolées avaient déjà eu lieu avec les troupes frontalières, mais insignifiantes. Le lundi nous avons vu notre premier prisonnier français. Quelle allure ! Déglingué, rapiécé et recousu. Nous étions encore absorbés dans nos commentaires à son sujet, que déjà quelques informations nous parvenaient des avant-postes, qui laissaient présager que le combat n’allait pas tarder à s’engager, ce qui fut le cas puisque l’après-midi le tintamarre commença. Nous nous sommes battus bravement. Notre général toujours en tête et nous, derrière. Des balles et la mitraille sifflaient au-dessus de nous, en blessant certains, mais le mot d’ordre était : « En avant, en avant » Nous progressions avec énergie. La bataille était très agitée. Nos « gris-vert » avançaient avec détermination et mordant. Nous progressions toujours davantage lorsque déjà nous tombâmes sur des blessés français et morts, ce qui dopa notre courage. Pour nous le combat se terminait trop tôt. L’aile gauche française céda et c’est ainsi que c’était terminé ; à présent les Français ne pouvaient plus tenir et fuyaient. Tu aurais dû voir les pantalons rouges détaler dans une fuite chaotique. Ce fut une fois encore notre cavalerie qui prit le fouet en main et veilla à la marche. Comme pour le premier prisonnier, les uniformes des autres étaient pitoyables. « On a faim, on a faim » s’écriaient-ils en demandant du pain. Depuis dimanche ils n’ont plus rien mangé et sont contents d’être chez nous. »

(Traduction tirée d'un ouvrage allemand)

 

 

 

11 mai 2014

Lagarde et la presse allemande

   La Gazette de Lorraine, journal quotidien en langue française, dont le siège est à Metz, a été créé pour ne pas laisser les lorrains dans l’ignorance des événements qui vont se dérouler. L’office supérieur de la censure établi à Berlin édicte les règles générales, et tous les articles sont contrôlés par un bureau à Berlin. L’importance de la victoire allemande à Lagarde est immédiatement amplifiée dans tous les journaux en Lorraine annexée et en Allemagne. Les différents articles parus affichent des résultats bien au-delà de la réalité.

   Gazette N° 8 du mercredi 12 août 1914.

   Victoire allemande sur la frontière lorraine.

Berlin, 11 août (B.W.) – Une brigade mixte détachée du 15e corps français a été attaquée par nos troupes de protection. Près de Lagarde, en Lorraine, l’ennemi a été repoussé avec de grandes pertes dans la forêt de Parroy, au nord-est de Lunéville. Il a laissé entre nos mains un drapeau, deux batteries, quatre mitrailleuses et 700 prisonniers. Un général français est tombé.

   Gazette N° 9 du 13 août.

   Près de Lagarde, les troupes allemandes ont fait plus de mille prisonniers non blessés, soit plus d’un sixième des deux régiments français qui ont pris part à l’engagement.

   Gazette N° 12 du mardi 18 août.

   Le combat de Lagarde. - aurait été des plus acharnés. Des témoins oculaires racontent qu’une mitrailleuse avait été placée sur la tour de l’église et faisait feu sans interruption. De toutes les maisons on tirait. Depuis huit jours, les Français s’étaient retranchés autour de Lagarde et avaient fait des fossés ; leur position était donc supérieure, mais malgré cela ils ne purent résister à la vigoureuse attaque des nos vaillantes troupes. On raconte que le maire et le curé de Lagarde auraient encouragé au combat contre les Allemands ; le curé aurait dirigé la lutte de l’église.

   GazetteN° 13 du mercredi 19 août.

   Le combat de Lagarde. – Voici encore de nouveaux détails sur le combat de Lagarde. Le combat a duré sept heures. Pendant une chaleur ardente, rapporte le « Pfälz. Merkur », les soldats allemands luttèrent avec succès et un courage bravant la mort contre un ennemi de beaucoup supérieur et retranché jusqu’au bout du nez. Les Français avaient établi des fortifications de campagne très étendues et ouvrirent surtout une vive fusillade à l’apparition de nos troupes sur une hauteur. Nos braves soldats ne se laissèrent pas arrêter et s’avancèrent impétueusement jusque dans les rangs ennemis. Pour arrêter la cavalerie allemande, les Français avaient rempli les prairies de sauts de loup, c'est-à-dire d’excavations qu’ils recouvraient de foin et d’herbe. Mais nos troupes remarquèrent l’attrape, de sorte qu’elle ne produisit pas l’effet désiré. L’attaque de l’artillerie allemande était également brillante. Deux batteries ennemies, dont l’activité était surtout dangereuse, furent bombardées avec un tel succès, qu’en peu de temps la position fut mûre pour l’assaut et put être prise. L’ennemi démonta les canons tant qu’il lui resta de temps. Autour du village même de Lagarde, le combat était très acharné.

   Là, les Français avaient occupé chaque maison. Sur le clocher avait pris position une section de mitrailleuses. Cette position était habilement dissimulée, mais dès qu’on l’avait remarquée, notre artillerie la bombarda, au point qu’après quelques coups on ne voyait que les ruines s’élever en l’air. Le village lui-même a du être bombardé.

   Une attaque par le flanc, dans laquelle la cavalerie intervint également avec succès, apporta la décision pour nous. De nombreux soldats français s’enfuirent tout simplement, d’autres levèrent les mains en l’air, en montrant leurs bagues, et demandèrent pardon. Des objets d’équipement français couvraient le champ de bataille. Un clairon, logé au village, doit deux fois sa vie à son instrument. Celui-ci ayant fait d’abord dévier une balle, lorsque le clairon le portait encore sur le dos, une seconde balle vint frapper l’ouverture, après que le soldat eut placé la trompette sur la poitrine. Cette fois-ci encore, la balle glissa et ne blessa que légèrement le soldat.

   Berlin, 14 août. – Les soldats faits prisonniers par les Allemands à Lagarde ont fait des dépositions importantes, fournissant au gouvernement allemand la preuve complète que depuis des semaines déjà la France était prête par tous les moyens pour surprendre l’Allemagne. La plupart des prisonniers font partie du corps de Marseille et avaient déjà été transférés à Lunéville, il y a six semaines, en pleine paix ! La plupart des garnisons françaises de l’ouest ont été transférées depuis le commencement de mai dans les forteresses de l’est pour renforcer la frontière de ce côté.

   Gazette N° 18 du mardi 25 août.

   Le conquérant du premier drapeau. – Le premier drapeau français qui, dans le combat de Lagarde, est tombé aux mains des Allemands a été dans la gazette du Wéber, pris par un soldat de Westphalie. C’est le fantassin FISCHER de Rimbeck (au sud-est de Paderborn) qui l’arracha des mains de celui qui le portait après un corps à corps acharné. Honneur à lui !

   Gazette N° 23 du lundi 31 août.

   Le curé de Lagarde. – L’Elsässer reçoit de source authentique les communications suivantes. Il y avait mercredi huit jours, un capitaine bavarois se présenta chez un curé du pays de Sarreguemines et annonça que les habitants auront des militaires à loger. Il craignit que ses soldats ne soient maltraités. Ensuite il raconta que nos troupes à Lagarde avaient été « trahies » par le curé. Les gens lui auraient raconté que le curé avait été amené enchaîné à Sarreguemines, parce qu’il avait « tiré du haut du clocher avec des mitrailleuses sur nos troupes », après avoir d’abord « attiré les Allemands dans le village » en disant qu’il n’y avait pas de Français. A Sarreguemines il aurait été fusillé. Plus tard un artilleur raconta que le curé n’avait pas été fusillé, mais que lui (le soldat) l’avait vu étendu devant l’église de Lagarde percé de trente coups de baïonnette. La vérité est, que le curé Demange de Lagarde se porte encore très bien à l’heure qu’il est. Il n’a pas encore quitté Lagarde un seul instant. Lorsque les Français occupaient son église, il protesta. Mais les Français le retinrent à l’église et c’est là que nos troupes le trouvèrent en prière devant le maître-autel. Le curé fut arrêté, mais ne tarda pas à être remis en liberté. Il a mis son église à la disposition des soldats pour servir de lazaret.

 

 

Publicité
Publicité
6 mai 2014

Impressions d'un officier d'alpins traversant Lagarde

   Le sous-lieutenant Georges Bertrand, sorti de Saint-Cyr, est versé au 6e bataillon de chasseurs alpins à Nice, dont le bataillon dépend du 15e corps d’armée. Dans son ouvrage « Carnet de route d’un officier d’alpins », paru en 1915, il nous livre ses impressions en ce début de guerre. Le 16 août 1914, le 6e bataillon de chasseurs alpins reçoit l’ordre de marcher vers la frontière et d’attaquer le bois de la Croix, entre les villages de Lagarde et de Moncourt où les Allemands se sont positionnés. Le bataillon arrive par le village frontière de Xures. Devant ses hommes, il rend hommage à cette province mutilée. Après avoir passé la frontière et avoir foulé du pied le sol ennemi à la tête de son unité, il vient de réaliser son rêve de jeunesse. Bientôt, c’est une toute autre réalité qui lui apparait :

  « Une odeur de sang et de chair corrompue monte du sol. Les ruisseaux du village sont pleins de sang. Les rues sont jonchées d’objets d’équipement aussi bien français qu’allemands. Il en est d’entièrement neufs. Un jardin clos est littéralement rempli de cuir – harnachement de sellerie ayant appartenu aux uhlans. Des habits, des sacs, des armes, des bidons traînent par terre : c’est lamentable.

   Nous nous arrêtons dans le village. Certains hommes s’approchent des tas de décombres pour y découvrir quelque richesse. Mais ils le font avec une certaine contrainte. J’avoue que je les regarde, un peu dégoûté…

   Dans ce village, devenu dans son entier un épouvantable charnier, se sont laissés surprendre deux bataillons français…Se laisser surprendre, c’est une faute au point de vue militaire. Mais c’est racheter amplement cette faute que de se défendre jusqu’au dernier, comme l’ont fait ces deux bataillons.

   Dans ce village, il a dû se dérouler un de ces drames anonymes, dont l’évocation fait passer un frisson de terreur. Se sentant perdus, nos hommes sont devenus des héros, et ils ont fait payer chèrement leur vie à ceux qui les avaient surpris. J’ai vu plus de quatre tombes communes contenant de 100 à 300 Allemands, surmontées d’une croix de bois, sur lesquelles étaient gravées par exemple de cette inscription : «  Hier Ruhen hundert deutsche Krieger. »

   J’étais curieux de voir pour la première fois des Lorrains annexés, de causer avec eux, afin de savoir ce qu’ils pensaient. Je rencontrai une bande de femmes en proie à une terreur folle. Réfugiées dans leurs caves depuis trois jours, elles avaient entendu, du fond de leur retraite, les échos du combat sanglant qui se déroulait dans le village. Assistant à la victoire successive des Allemands et des Français, elles ne savaient plus que penser ni que dire, et nous regardaient d’un œil hagard, sans oser ouvrir la bouche. La peur du Germain avait rendu les Lorrains prudents… »

 

Lagarde tombe 2

 

20 avril 2014

Le Monument équestre de Lagarde

   Sur la tombe des sept officiers de cavalerie qui reposent en ce lieu, un monument en signe de fidélité et à la gloire de cette arme venue se battre à Lagarde, dont laquai-totalité a trouvé la mort, été érigé en 1915.

La façade ressemble fort à celle d’un temple Grec avec la croix de fer sur le fronton ; au centre une plaque rappelle les noms des officiers de cavalerie bavarois.

   Entre la voûte et les colonnes un tableau noir avec inscription en lettres dorées. 

   "Ferme dans la fidélité jusqu’à la mort !

   Ici reposent sept officiers de cavalerie bavarois :

Monument 5

Capitaine de cavalerie Schöninger, capitaine de cavalerie baron von Feury auf Hilling, lieutenant Prieger, lieutenant baron von Syberg zu Sümmern lieutenant baron von Nostiz, lieutenant Fauner, lieutenant de réserve Dietrich von und erbmannszahl.

   Ils sont tombés là au cours de la glorieuse charge de la 4e brigade de cavalerie bavaroise, le 11 août 1914".

   Les Bavarois disent que dans le plus précieux caveau de famille, le baronnage des cavaliers n’aurait pu trouver aucune tombe comme ici, en ce lieu qui voyait leur mort pleine de gloire, qui a inscrit leurs noms sur le livre des héros.

 

 

19 avril 2014

Le baptême du feu du 2e bataillon de chasseurs royal de Bavière

   Le 10 août, vers 9 heures, le 2e bataillon de chasseurs royal de Bavière atteint par Amenoncourt la route Remoncourt-Moussey avec la mission d’assurer, pendant toute la journée la protection de la division de cavalerie bavaroise disposée autour de Moussey, à laquelle il est à nouveau subordonné. La 2e compagnie est avancée dans la ferme de Fricourt, la 4e vers Belcourt ; le bataillon se trouve à l’angle nord du petit bois à 800 m de la ferme. Des patrouilles de cyclistes et de cavalerie ont un contact étroit avec l’ennemi. A 18 heures, le bataillon se replie vers Bourdonnay par Maizières, suivi par un violent bruit de combat venant de l’ouest. Le bataillon doit par des avant-postes près d’Ommeray, assurer la sécurité de la division de cavalerie bavaroise qui va passer la nuit dans la campagne au nord-est de ce village.

   Combat de Lagarde 11 août 1914

   À Bourdonnay, le commandant du bataillon reçoit de la 4e Brigade de cavalerie bavaroise (général baron von Redwitz), l’information selon laquelle la compagnie de protection de la frontière se trouvant à Lagarde (8e compagnie du 131e régiment d’infanterie) a été peu avant rejetée par une attaque française contre Bourdonnay, soutenue par de l’artillerie ; le commandant du bataillon est chargé de rétablir la situation. Dans la nuit noire le bataillon se tourne vers Lagarde, rencontrant de l’infanterie qui se replie et quelques cavaliers. La situation - notamment l’évaluation des Français - est complètement confuse.

   Arrivé sur la hauteur du bois Chanal (1 km au sud de Bourdonnay), le lieutenant-colonel Lettenmayer se décide depuis là à reprendre Lagarde de nuit, une décision qui ultérieurement est agréée par la division de cavalerie bavaroise ; car, en tout état de cause l’opération ainsi menée épargnerait beaucoup de sang au bataillon. En effet, comme cela se révèle le jour suivant, l’attaque a été menée par des éléments de la 59e brigade française appuyée par deux batteries. Le bataillon de chasseurs passe la nuit avec la 8e compagnie du 131e régiment d’infanterie, en ayant une importante couverture de tirailleurs constituée par les 1e  et 4e compagnies, à la sortie sud de Bourdonnay.

   Le 11 août à 5 heures du matin, le commandement de la 65e brigade d’infanterie reçoit l’information selon laquelle la reprise de Lagarde sera exécutée ce jour par la 42e division d’infanterie (général von Bredow). La brigade sera renforcée par des éléments de la division de cavalerie bavaroise, le 2e bataillon de chasseurs royal de Bavière avec en plus la 8e compagnie du 131e régiment d’infanterie, soutenu par une batterie du 8e régiment d’artillerie de campagne. Elle devrait prendre vers 9 heures du matin Lagarde en avançant depuis Bourdonnay.

   A droite du bataillon de chasseurs, des éléments de la 65e brigade d’infanterie devraient avancer à partir de la ligne Ley-Ommeray vers la forêt du haut de la Croix (2 km au sud d’Ommeray) et Lagarde ; à gauche, des éléments de la 59e brigade d’infanterie attaqueraient le flanc et les arrières des Français à partir d’Igney par Vaucourt.

   Après une courte mise en place derrière la cote 274, le bataillon de chasseurs commence sa progression avec les 1ère et 4e compagnies en premier échelon, le 2e et 3e compagnies en deuxième (à gauche et à droite), et la 8e compagnie du 131e régiment d’infanterie en troisième derrière le milieu. Cette formation s’organise au début des deux côtés de la route Bourdonnay-Lagarde ; ensuite elle se déploie sur le seul côté droit de l’axe.

( Extrait de K.B. Jäger Regiment Nr.2 du Major a. D. Dessner)

19 avril 2014

Château de Martincourt : rester ou fuir

   Heinrich Bergerfurth est le propriétaire du château de Martincourt et de ses dépendances depuis 1897. Il se situe au sud de Lagarde, à la frontière de la Lorraine annexée. Martha sa fille, dans la traduction de son journal, (Château de Martincourt et ses habitants pendant les années de guerre 1914-1918), évoque ses souvenirs, notamment les dates et les événements importants qui vont bouleverser leur vie.

   Mardi 28 juillet 1914 – Papa est allé à Xures et il a vu là-bas des garde-frontières français munis de cartouches à balles réelles, dans le fossé au bord de la route de Vaucourt qui faisaient le gué ; dans le village lui-même le calme régnait.

   Samedi 1er août 1914 – A 5 heures du matin, papa se renseigna à Lagarde pour savoir si c’était la mobilisation, à quoi on lui répondit par la négative, mais les réservistes avaient été rappelés dans la nuit. Nous ne pouvions plus téléphoner plus loin qu’à Lagarde, il n’y avait plus de lettres ni de journaux pour nous. Les heures se succédaient identiques à elles-mêmes quand soudain le téléphone redouté sonna : c’était une dépêche du bureau de recrutement qui stipulait que la voiture devait être livrée à Dieuze.

   À 9 h. Weber s’y rendit et à 5 h. je l’entendis revenir et je pensai aussitôt que le danger était passé. Malheureusement, c’était une erreur ; il y avait eu un accrochage avec un autre véhicule, devait en informer papa et repartir aussitôt. Il dit qu’à Dieuze tout était prêt mais que personne ne songeait à quelque chose de sérieux. Nous fûmes soulagés !

   Depuis mercredi, il y avait autour de Martincourt des sentinelles, le soir aussi ; je n’avais pas particulièrement envie de m’entretenir avec elles. Pour la première fois nous allions nous coucher un peu plus rassurés, quant à minuit nous fûmes confrontés à la cruelle réalité.

   C’était la mobilisation….

   Une heure plus tard, Weber emmena la voiture pour repartir tout de suite. A 5 heures, on reçut l’ordre de conduire les chevaux à Bénestroff et tous ceux de 17 à 45 ans devaient répondre à l’appel. Papa essaya alors de vendre son bétail : 46 têtes, ce qu’il réussit d’ailleurs. Dans la soirée, on les mena à Lagarde, toute sa fierté. Il ne restait que 7 vaches et 12 veaux. La famille Schiffmann devait rallier Martincourt pour la durée de la guerre, étant donné que le moulin était trop isolé. Le dimanche après-midi, nous emballâmes nos vêtements et notre linge dans une valise, que nous transportâmes à la cave. Nous pensions bien à un incendie éventuel mais pas à un vol.

    Lundi 3 aoûtAlors qu’il est informé que les Français l’arrêteraient immédiatement comme espion, il décide de fuir le domaine avec sa famille.

   Papa nous communiqua son plan à savoir transmettre l’affaire à Schiffmann et s’enfuir. Nous nous y opposâmes tous, car nous ne voulions pas quitter nos gens, mais quand nous entendîmes ses arguments, nous devions lui donner raison. Maintenant, il était convenu que nous partirions ce jour dans l’après-midi. Nous commençâmes alors à nous préparer et papa partit à Lagarde. Une demi-heure plus tard, il revint et nous cria que dans une demi-heure nous devions avoir quitté la ferme. Dans la nuit, des cavaliers du 7e dragons avaient été relevés ; ceux-ci lui avaient dit que le danger s’approchait. Pendant que nous nous préparions, un sous-lieutenant des dragons nous apporta, en filant à toute allure dans le parc, le passeport : ça sentait le roussi.

   Nous prîmes congés de Martincourt sans tambour ni trompette, sans soupçonner comment nous le retrouverions. Nous pouvions prendre comme bagages que 2 sacs avec le strict nécessaire. A Lagarde, nous apprîmes que la guerre était déclarée à la Russie. Tout s’acharnait contre nous et on craignait les Français. Nous dûmes passer plusieurs sentinelles et arrivâmes d’abord à Marimont, où c’était encore relativement calme. A la ferme d’Ormange, un nouveau messager de malheur au grand galop nous rencontra : nous avions déclaré la guerre à la France. Dans la nuit des avions français avaient déjà lancé des bombes sur le Bade et le Wurtemberg.

14 avril 2014

Des artilleurs courageux au combat de Lagarde

   Le capitaine Cailles, officier d’artillerie, est à la tête de la 2e batterie du 19e régiment d’artillerie de campagne (Nimes),  à l’effectif de 171 sous-officiers et hommes de troupe, 167 chevaux. Dans son carnet de guerre, il brosse le tableau des événements qui se sont passés à Lagarde les 10 et 11 août 1914. Il fait part de ses émotions et livre ses impressions sur la situation de son groupe d’artillerie lors de l’exécution des ordres.

   Il est incontestable que la violence de l’attaque, le 11, et le brusque dénouement de l’affaire ont causé à certains éléments une émotion que plus tard et mieux aguerris, ils n’auraient pas ressentie. C’est ainsi que les avant-trains de la 3e batterie pris sous le feu se sont débandés, que ceux de la 2e batterie se sont laissés emporter (ils ont rejoint à Parroy), que des équipages d’infanterie ont fui à toute la vitesse de leurs chevaux.

   En revanche les actes de courage ont été nombreux. Le personnel des batteries (1ère et 3e) a été au-dessus de tout éloge. Officiers, gradés et canonniers se sont fait tuer sur leurs pièces (il est revenu à l’arrière 3 hommes de la 1ère et 5 de la 3; tout le reste fut tué ou pris). En particulier le lieutenant Ficonetti fut l’âme de la défense, combattant à coups de canon puis de carabine jusqu’à ce qu’une balle dans le cou le couchât au sol.

(Extrait des carnets d’Alexis Callies, retranscrits et commentés par Eric Labayle)

Les canons français pris à Lagarde et à Lunéville exposés à Sarrebruck.

Canons Lagarde

Publicité
Publicité
1 2 3 > >>
Publicité